Jean Lurçat (1892 – 1966) est un nom qui résonne dans le monde de l’art, évoquant des tapisseries monumentales aux couleurs vibrantes et aux motifs captivants.

    Dans cet article nous allons explorer non seulement la vie et l’œuvre de Jean Lurçat, mais aussi son lien indéfectible avec le Lot, un territoire qu’il a adopté et aimé, et qui a nourri son œuvre d’une sensibilité unique, tissant un lien indéfectible entre l’homme et son terroir.

    Lurçat est passé à la postérité grâce sa rénovation de l’art de la tapisserie, pour faire entrer cet art ancien dans l’univers de son époque.

    Ci-contre Jean Lurçat photographié par Robert Doisneau en 1945 dans son atelier à Saint-Laurent-les-Tours.

    Ci-dessous Jean Lurçat photographié par Robert Doisneau en 1945 dans son atelier à Saint-Laurent-les-Tours.

    Jean Lurçat photographié par Robert Doisneau
    @ Atelier Robert Doisneau

    Jean lurçat, un talent exceptionnel 

    Des débuts artistiques en tant que peintre

    Jean Lurçat est né en 1892 à Bruyères, dans les Vosges. Il commence des études de médecine qu’il abandonne pour se consacrer à la peinture.

    Il intègre l’école de Nancy jusqu’en 1912. Il s’installe ensuite à Paris pour étudier la peinture et la gravure. Il est influencé par ses camarades Henri Matisse, Paul Cézanne, Auguste Renoir…

    Il acquiert vite le succès et expose ses œuvres à travers l’Europe, à New-York, à Moscou…

    Une approche novatrice de la tapisserie

    Des débuts à la technique classique…

    Ce sont d’abord sa mère puis sa première épouse, Marthe Hennebert, qui réalisent les premières tapisseries de Lurçat, des canevas à l’aiguille.

    En 1937 commence une collaboration avec la Manufacture des Gobelins pour des tapisseries de haute lisse, en laine et soie.

    …à la renaissance de la tapisserie

    En 1939, Lurçat s’installe à Aubusson.

    Il met au point un nouveau langage technique : des cartons dits « à tons comptés », une palette de couleurs réduite et un tissage robuste à large point.

    Plutôt que de demander à la tapisserie de reproduire un tableau, l’artiste en tant que « peintre-cartonnier » s’adapte aux possibilités techniques de la tapisserie, en produisant un carton numéroté.

    La composition est pensée dès le départ pour la tapisserie : le carton est dessiné à la taille réelle, chaque surface colorée est désignée par un chiffre. Le carton est majoritairement monochrome, ce qui demande à l’artiste un œil sûr pour l’interpréter en couleur et imaginer ce que sera la tapisserie une fois tissée.

    Avec le carton numéroté, le lissier peut suivre fidèlement le choix de l’artiste car il utilise les mêmes numéros de couleur.

    Un style symbolique et poétique

    Marqué par les mouvements artistiques majeurs du 20ème siècle, Lurçat s’est finalement affirmé comme un symboliste accompli dans ses créations de tapisserie.

    S’inspirant initialement du fauvisme, il explore ensuite les formes du cubisme avant de se tourner vers le surréalisme.

    Pourtant, c’est bien le symbolisme qui imprègne profondément son œuvre tapissière.

    Lurçat utilise des symboles récurrents, tels que le coq, annonciateur de l’aube, et le soleil, source de vie, qu’il répète avec intention.

    Parfois, il intègre des symboles plus originaux et élaborés, toujours au service d’un message profond.

    Son style se caractérise par un dessin stylisé, à la fois clair et dense, où l’utilisation de motifs végétaux pour remplir les formes est déjà omniprésente.

    Tapisserie de Jean Lurçat
    Château de Saint-Laurent-les-Tours

    Un coup de foudre pour le Lot

    Au début de la Seconde Guerre Mondiale, Lurçat doit fuir Aubusson. Il se réfugie dans le Lot et s’engage dans la Résistance.

    Il découvre le Château de Saint-Laurent-les-Tours, une forteresse du 11ème siècle qui domine de ses remparts la petite ville de Saint-Céré : le lieu est utilisé comme radio clandestine par la Résistance.

    Il dira : « Nom de Dieu ! Je veux crever si un jour ce n’est pas à moi. »

    Il achète le château en 1945 qui devient alors tout à la fois son lieu de vie et son lieu de création.

    Avec un hauteur moyenne des plafonds de six mètres, Lurçat dispose d’un lieu idéal pour ses tapisseries monumentales !

    En 1986, à la mort de sa veuve (sa compagne de la Résistance et troisième épouse, Simone Selves), celle-ci lègue le château au Conseil Général du Lot. Le lieu devient un musée qui est ouvert au public en 1988.

    Le Casino de Saint-Céré

    Dans les années 1940, Jean Cassagnade, un passionné de rugby, a pour projet de construire une buvette pour les joueurs, mais inspiré par les casinos de la Côte d’Azur, il décide de voir plus grand et de transformer son idée en un véritable casino.

    Le Casino ouvre ses portes en 1942 et devient un lieu de divertissement populaire. Cependant, la loi change en 1945, interdisant l’ouverture de salles de jeux en dehors des villes thermales.

    Le neveu de Jean Cassagnade, Pierre Delbos, musicien de profession, décide alors de transformer le Casino en une salle de concert, conservant le nom original.

    Le Casino de Saint-Céré devient une scène incontournable, surnommé « l’Olympia du Lot » par les médias d’alors : de nombreux artistes s’y sont produit (Aznavour, Brel, Brassens, Ferré, Gréco, Barbara…).

    Au fil des années, le Casino de Saint-Céré s’impose comme un véritable lieu de vie culturel : sous l’impulsion de Jean Lurçat en 1947 le lieu accueille aussi une galerie d’art, qui exposera Picasso, Magritte, Doisneau…

    Les amitiés lotoises de Lurçat

    Cette riche vie culturelle crée une chaîne d’amis entre Jean Lurçat, Jean Cassagnade et Pierre Delbos.

    Il faut y ajouter Pierre Betz, qui est installé à Souillac et qui édite la revue littéraire et artistique Le Point, ainsi que Robert Doisneau, grand photographe et très attaché à la campagne du Lot.

    Son œuvre magistrale : le Chant du Monde

    En 1956, alité par une sciatique, Lurçat prend le temps de lire un ouvrage consacré à la « Tenture de l’Apocalypse ».

    Cette œuvre d’art unique au monde est aussi le plus grand ensemble de tapisseries médiévales existant (74 scènes, 103 mètres de long).

    Pour Lurçat, c’est une révélation et il décide d’en réaliser une réplique moderne.

    L’artiste à vécu les deux guerres mondiales et il en a été profondément marqué ; son œuvre se doit d’adresser un message d’espoir et de paix : dix tableaux relatent le combat du Bien contre le Mal.

    Cet immense projet initialement intitulé la « Joie de Vivre » sera rebaptisé « Le Chant du Monde ».

    Les tapisseries sont tissées à Aubusson, sur une durée de 10 ans, pour obtenir une tenture de 80 mètres de long sur 4,40 mètres de hauteur.

    Mort subitement en 1966 lors d’un voyage à Saint-Paul-de-Vence, Lurçat ne verra pas le dernier tableau terminé. Il envisageait d’ailleurs d’en réaliser un onzième sur le thème de la musique.

    Cette œuvre monumentale a été acquise par la ville d’Angers pour être exposée à l’Hôpital Saint-Jean (Musée Jean Lurçat et de la Tapisserie Contemporaine).

    Jean Lurçat - Le Chant du-Monde

    Le travail de la céramique

    En 1951 Lurçat se rend à Sant Vicens, près de Perpignan, pour découvrir le centre potier créé par Firmin Bauby dans un ancien mas viticole. 

    Il découvre la céramique, et cet autre médium va tout autant le passionner.

    À partir de ce moment là, il séjourne deux fois par an à l’atelier de céramique.

    Cette immersion dans le monde de la terre cuite lui offre un terrain d’expérimentation fertile.

    Lurçat aborde la céramique avec la même liberté créatrice qui caractérise ses tapisseries. Il explore une large palette de techniques et de styles, allant de la faïence décorée de motifs stylisés aux pièces plus rustiques en grès. 

    Ses créations céramiques, souvent empreintes de symbolisme et de poésie, mettent en valeur la beauté brute des matériaux et la virtuosité des artisans céramistes.

    Il produit aussi bien des pièces de vaisselle (assiettes, plats, pichets…) ou de décoration (vases, carreaux…), ainsi que des fresques monumentales.

    Les autres médiums

    Lurçat a aussi abordé d’autres domaines artistiques : le papier peint, le tissu (tapisserie imprimée), le verre (vitrail), la lithographie, la gravure, l’édition (illustration de livres) et même les décors de théâtre.

    Jean Lurçat était un artiste polyvalent et talentueux, un représentant majeur des arts décoratifs, qui a produit une œuvre prolifique et diversifiée.

    Son travail a eu un impact profond sur l’art du 20ème siècle, et il continue d’être admiré par les amateurs d’art du monde entier.

    L’atelier-musée Jean Lurçat se situe à 20 minutes du Pech de Vigne.

    C’est donc un belle visite que nous vous recommandons si vous séjournez chez nous et que vous êtes amateur d’art.

    Vue générale du gîte